Journal de Jean-Yves sur Mai 68

Scout Pionnier 32-33 de mai 68

Ce journal est une expression d’un avis. Il se présente comme un journal d’un pionnier. Il y en avait deux dans cette revue.
Un concerne la mort de JF.Kennedy et de Martin Luther King. L’autre aborde les événements de 68. C’est celui-là que nous reproduisons.

Cet article fait partie d’une série d’articles présentant le regard de chaque association scoute sur Mai 68, regard véhiculé par leurs revues. Retrouver les différents regards.

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Quel spectacle ces dernières semaines ! Quelles violences ! Pas seulement en France mais partout dans le monde. On ne sait pas où donner de la tête sans voir des gens qui se cognent dessus, des blessés, du sang et des morts.

Je relis la page écrite avant-hier [Concernant les morts de Martin Luther King et JFK - NDLR]. On est culotté quand même chez les pionniers, qu’est-ce qu’on ne se croit pas, nous les gars de 15 ans de chanter des trucs comme ça dans un monde pareil avec les bagarres au Quartier Latin, à Lyon, à Bordeaux, les massacres des Biaffrais, la guerre au Vietnam et les accrochages israélo-Jordaniens, les bagarres entre commerçants juifs et ouvriers musulmans à Belleville, et King et Kennedy [assassinés en 68 – NDLR].

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C’est à vomir. Il y a des jours comme aujourd’hui où le suis vraiment paumé. Qu’est-ce qu’en peut faire quand on a 15 ou 16 ans ?

Pourtant au lycée on a prouvé qu’on était capable d’être sérieux.

Aujourd’hui il y a les gars qu’on n’a pas vu depuis un mois qui commencent à revenir. Ils s’étonnent de la manière qu’on discute avec les profs du travail fait dans les commissions. Ils sont comme beaucoup d’adultes. Certains étaient persuadés qu’on avait tout cassé, qu’on jouait aux gardes rouges. Il y a même Bertrand M. qui m’a demandé si j’avais adhéré au Parti communiste. Tu parles d’une bible. Tout ça c’est des trucs de vieux.

Tout le monde maintenant parle avec les profs. Avant il n’y avait que les fayots, la commission « programme » des élèves est arrivée alors qu’elle se réunissait sans profs aux mêmes conclusions que la commission des profs qui se réunissait sans élèves. Ça signifie quelque chose.

Beaucoup d’adultes ne croient pas à tout ça, que des jeunes peuvent prendre la vie au sérieux : grosse discussion, dimanche, à la maison : mon père nous soutenait et disait que sur le plan éducatif c’était formidable parce que le plus important pour un homme, c’était d’être capable de se prendre en charge. Mon oncle affirmait qu’on avait surtout besoin de coups de pied au c... Il a beau avoir 10 ans de moins que papa c’est un vieux, il a peur, il ne fait plus confiance aux gens. Il critique et c’est tout.

C’est là le problème. Les ouvriers au début de leur grève, les étudiants, nous voulons qu’on nous fasse confiance. Tous veulent participer comme chez les pionniers, chacun doit avoir sa responsabilité.

S’il n’y a qu’une seule et même violence, il n’y a aussi qu’une seule et même volonté de participer à la vie du monde, et d’être un peu plus homme.

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